Reliure aux armes de Henri II exécutée à Fontainebleau vers 1552 par l'atelier de Gomar Estienne, relieur du roi. Cette commande s’inscrit dans une nouvelle phase du programme de reliure bellifontain qui s’ouvre au début des années 1550 à des groupes choisis d’ouvrages faisant partie des collections royales historiques, déménagées au printemps 1544 du château de Blois à celui de Fontainebleau. Cette pièce présente ainsi toutes les caractéristiques structurelles et décoratives d’une série de reliures réalisées vers 1552 sur un petit ensemble de manuscrits et d’imprimés latins saisis à Naples par Charles VIII (1483-1498), dans la bibliothèque des rois aragonais, ainsi que quelques volumes d'origine italienne, comme c'est ici le cas. Concernant la reliure proprement dite, on retrouve ici les éléments distinctifs du cahier des charges mis en place pour ce petit groupe : plats constitués d’ais aux chants biseautés en partie ou sur tout leur longueur, dos long à coiffes simples, tranchefiles simples, pattes de cuir avec agrafes métalliques (aujourd’hui disparues) en guise de fermoirs, boulons dans les angles (aujourd'hui disparus). Le choix d'un maroquin noir relève en revanche d'une exception dans un ensemble où prédominent les maroquins orange. L’héraldique royale propose de même ici les éléments propres à ce petit groupe homogène : sur les plats, petite plaque centrale aux armes de Henri II poussée sur un médaillon ovale de maroquin de couleur, mosaïqué, et fers emblématiques argentés associés à des fleurs de lis aussi argentées ; en revanche, le dos fait ici exception, avec un recours minimaliste à l'emblématique royale (simple H couronné dans chaque caisson).

Concernant le décor de cette reliure, il répond à la règle intangible, commune à toutes les reliures du programme bellifontain, d’une disposition sous la forme d’un encadrement rectangulaire et consiste ici en une large bande d'entrelacs géométriques argentée dont le dessin se dessine en réserve sur un fond pointillé rouge et blanc très dense, réalisé au pinceau. Ces entrelacs sont entièrement exécutés aux filets et obtenus par la combinaison de deux patrons, respectivement placés dans les angles (forme géométrique triangulaire) et, en continu, sur les quatre côtés (cartouches aux terminaisons faites de bandes plates). Ce décor se retrouve à l'identique sur la reliure d'un manuscrit (mentionnée ci-dessous), ainsi que sur une troisième reliure, portée sur un exemplaire de la Historia... di Milano de B. Corio (Milan, 1520), volume aujourd'hui conservé à la Bibliothèque mazarine sous la cote « 2° 5757 [Res] ») ; cette reliure en maroquin orange est d'un format légèrement supérieur aux deux autres, ce qui a nécessité d'adapter le dessin de la bordure d'entrelacs peints en noir (cartouche médian rallongé sur les petits côtés et forme ovalisante aajoutée au mitan des grands côtés), le bloc armorial de Henri II étant quant à lui poussé sur un ovale de maroquin noir.

Outre sa reliure, cet exemplaire de grand luxe, imprimé sur vélin, est remarquable aussi par la qualité de son enluminure, due au maître des Putti, atelier actif à Venise de 1466 à 175 environ, également responsable des enluminures de plusieurs autres volumes sortis des presses vénitiennes de Johannes et Vindelinus de Spire. Ce volume a appartenu à Gian Francesco Torresano d'Asola, comme l'indique la présence de son ex-libris manuscrit en tête de la page de titre : « a me Jo. Francisco Asulano ». C'est selon toute vraisemblance à la faveur d'un don de ce dernier à François Ier (1515-1547) que ce volume est entré dans les collections du roi.